Arcellor Mittal : un contre-exemple en matière d'environnement et de santé
Suite à plusieurs plans d’actions jugés insuffisants, l’inspection du travail avait décidé le 19 juin 2023 de fermer temporairement l’aciérie de Fos-sur-Mer, partie centrale de l’usine d’ArcelorMittal, afin que l’industrie applique les mesures de protection adaptées à ses salariés, anormalement exposés à des produits cancérogènes. FNE Provence-Alpes-Côte d’Azur et FNE Bouches-du-Rhône s’étaient réjouies de cette décision au vu des nombreux manquements répétés de cette industrie.
Suite à un recours de la société ArcelorMittal, le Tribunal administratif de Marseille a annulé la décision de l’Inspection du Travail, au motif de la «liberté du commerce et de l’industrie».
ArcelorMittal, première société émettrice de CO2 en France et bien connue de la justice
Déjà en 2009, le Tribunal correctionnel d’Aix-en-Provence avait condamné la société pour pollution des eaux, exploitation non-conforme d’une installation autorisée et non-déclaration d’incident. Le Tribunal avait relevé six dysfonctionnements, négligences, erreurs et carences en matière de formation. Il avait également fait référence à une précédente pollution aux hydrocarbures de la société en 2004, suite à une anomalie concernant l’étanchéité d’un barrage de protection, et à un système de gestion de sécurité « archaïque » selon la Direction Départementale de l’Equipement.
En 2013, ArcelorMittal est assignée devant le Tribunal de Grande Instance de Martigues pour pollution maritime et dépassement des valeurs limites d’émission de polluants dans l’air. Deux écarts en matière d’émissions atmosphérique sont relevés en raison d’une mauvaise étanchéité des fours.
La dernière condamnation date de juillet 2021, où le Tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence avait condamné le site d’ArcelorMittal de Fos-sur-Mer pour 36 infractions environnementales. Un message fort envoyé en faveur de la santé des populations et de la préservation de l’environnement.
Et en mars dernier, FNE Provence-Alpes-Côte d’Azur et FNE Bouches-du-Rhône décidaient d’agir à nouveau face à la persistance de la société à faire preuve de négligence face aux réglementations protégeant la santé et l’environnement. En effet, malgré de nombreux arrêtés de mise en demeure, 2 amendes administratives, 3 condamnations en justice, le leader européen de l’acier tarde encore à se conformer à la réglementation environnementale.
L’interdépendance entre santé humaine et environnement
Le benzène est un cancérogène reconnu, susceptible d’affecter le système nerveux. Or, en 2017, certains relevés de l’Inspection des ICPE ont démontré des dépassements par la société de plus de 10 fois la valeur maximale autorisée. Autre exemple, l’oxyde d’azote est un gaz irritant pouvant engendrer des problèmes respiratoires et pulmonaires, en plus d’être un gaz à effet de serre. Là encore, la DREAL a constaté des dépassements des valeurs journalières supérieurs à 110% de la valeur limite d’émission. Des dépassements équivalents ont été mesurés pour le dioxyde de soufre ou le paramètre poussières.
Au-delà des risques causés par chaque substance individuellement, l’« effet cocktail » représente un vrai danger pour les personnes qui subissent ces pollutions au quotidien. De plus en plus d’études révèlent que le cumul de substances chimiques en mélange aggrave les conséquences sanitaires des polluants.
Une étude de l’ANSES de 2022 démontre d’ailleurs que les habitants de Fos et aux alentours ont deux fois plus de cancers que la moyenne nationale et sont davantage touchés par les maladies chroniques et auto immunes.
Des efforts de la part de l’industriel insuffisants malgré les aides publiques
Des subventions colossales (soit 44 millions d’euros d’aides publiques selon Marsactu) ont été accordées à l’usine sidérurgique par les services de l’Etat et l’Union Européenne afin que le site fasse l’objet d’une modernisation, et réduise drastiquement ses taux de pollution. Cependant, les efforts d’investissements de l’industriel restent bien trop insuffisants.
Cette décision du Tribunal administratif de Marseille de suspendre celle de l’Inspection du Travail, pourtant temporaire et dans le seul but d’une mise aux normes, montre que les intérêts supérieurs fondamentaux de santé publique, de sécurité et de protection de l’environnement continuent d’être négligés par certains géants industriels, qui génèrent des profits toujours plus importants, soutenus par des financements publics.
Nous ne pouvons donc que déplorer cette décision du Tribunal administratif qui place les intérêts industriels avant ceux de l’environnement et la santé des habitants du territoire.